Le Monde- 7 avril 2016

Par François Rochebloine (UDI), député (Loire) ; Guy Tessier (LR), député (Bouches-du-Rhône), René Rouquet (PS), député (Val-de-Marne), Nicolas Daragon (LR), maire de Valence, Luc Carvounas (PS), sénateur (Val-de-Marne François), André Santini (UDI) député (Hauts-de-Seine)

Voilà maintenant six jours que le Caucase du Sud s’est à nouveau embrasé. Conforté par l’indifférence internationale, l’Azerbaïdjan sous la férule d’Ilham Aliev a tenté de reprendre par la force son ancienne colonie, la République du Haut-Karabagh. Cette offensive meurtrière de part et d’autre vient provisoirement de se conclure par un cessez-le-feu précaire.

A l’heure où le groupe de Minsk de l’OSCE (co-présidé par la France, la Russie et les Etats-Unis) a réuni dans l’urgence les belligérants, il faut constater que cette attaque n’aura servi à rien ni à personne, puisque le rapport de force et la ligne de front restent inchangés.

Il n’en reste pas moins qu’à nouveau, des civils karabaghiotes ont payé de leur vie les pulsions revanchardes du despote de Bakou : villes délibérément ciblées par des bombardements, enfants tués dans la cour de leur école, civils mutilés et assassinés par des commandos infiltrés spécialement à cette occasion.

Il n’en reste pas moins aussi que cette nouvelle agression est porteuse de leçons. Qui oserait encore demander aux Karabaghiotes d’intégrer le giron d’un régime qui ne souhaite que leur anéantissement physique ? Pour les Karabaghiotes, l’indépendance et l’établissement de la République n’ont jamais été des fins en soi mais un moyen ; le moyen de vivre en paix et en sécurité, le moyen de construire un Etat démocratique respectueux de ses citoyens, ouvert sur le monde et tourné vers l’avenir.

L’Azerbaïdjan est pour sa part un pays riche mais les Azerbaïdjanais sont pauvres. Ils n’ont en en vérité que faire d’arpents supplémentaires mais ils ont légitimement le droit de bénéficier de la manne pétrolière qu’accapare la famille régnante. Pour le clan Aliev, régulièrement cité au palmarès des « Swissleaks » et autres « Panama Papers », la guerre contre le Haut-Karabagh reste un bon moyen de détourner l’attention de ses concitoyens de sa corruption matérielle et morale par laquelle il appauvrit son peuple.

La communauté internationale, parfaitement au fait de tout cela, doit donc prendre ses responsabilités. Nous proposons que le groupe de Minsk de l’OSCE établisse les négociations à venir sur les bases suivantes qui seront certainement plus fructueuses.

D’une part la République du Haut-Karabagh qui donne depuis plus de vingt ans la preuve de sa viabilité et de sa crédibilité doit être maintenant préalablement reconnue afin que Bakou cesse d’utiliser ce prétexte d’absence de reconnaissance pour agresser des populations civiles.

D’autre part, la République du Haut-Karabakh doit être réadmise à la table des négociations : au XXIe siècle, négocier in absentia le sort d’une population et de ses instances représentatives est un procédé qui est au mieux vide de sens. En outre, l’esprit de responsabilité et la volonté d’apaisement qui avaient conduit le Haut-Karabakh, signataire du cessez-le-feu de 1994, à accepter d’être représenté par l’Arménie n’a manifestement pas apaisé l’Azerbaïdjan. Revenons donc au dialogue direct, car c’est possible comme l’a montré le cessez-le-feu de ce 5 avril annoncé – selon l’AFP – entre Stepanakert et Bakou, et entre eux seuls.

Pour finir, il faudra imposer aux parties des mesures effectives de suivi du cessez-le-feu, mesures déjà acceptées par Erevan et Stepanakert, et que seul Bakou refuse obstinément. A ce sujet et au regard des événements graves qui viennent de se dérouler, nous appelons la Présidence du groupe de Minsk de l’OSCE à diligenter une commission d’enquête qui établira les faits et les responsabilités. Il deviendra alors possible d’appliquer un régime de sanctions politiques et juridiques aux fauteurs de guerre, comme c’est le cas dans bien d’autres conflits régionaux dans le monde.

Autres signataires : Michel Amiel (RDSE), sénateur (Bouches-du-Rhône) ; Roland Blum (LR), maire adjoint de Marseille ; Valérie Boyer (LR), député (Bouches-du-Rhône) ; François Pupponi (PS), député (Val d’Oise) ; Hugues Fourage (PS), député (Vendée) ; Bernard Fournier (LR), sénateur (Loire) ; Sophie Joissains (LR), sénateur (Bouches-du-Rhône) ; Arlette Grosskost (LR), député (Haut-Rhin) ; Jean-Jacques Guillet (LR), député (Hauts-de-Seine) ; Christian Kert (LR), député (Bouches-du-Rhône) ; Patrick Labaune (LR), député (Drôme) ; Philippe Marini (LR), sénateur honoraire (Oise) et maire de Compiègne ; François-Michel Lambert (EELV), député (Bouches-du-Rhône) ; Richard Mallié (LR), maire de Bouc-Bel-Air ; Emmanuel Mandon (UDI), conseiller régional (Rhône-Alpes Auvergne) ; Christophe Masse (PS), conseiller général (Bouches-du-Rhône) ; Marlène Mourier (LR), maire de Bourg-lès-Valence ; Jacques Remiller (LR), ancien député, maire honoraire de Vienne ; Alain Néri (PS), sénateur (Puy-de-Dôme) ; Rudy Salles (UDI), député (Alpes-Maritimes)