Aram I,Catholicos arménien de Cilicie, a envoyé une lettre au Premier Ministre turc Recep Tayyip Erdogan suite à la décision du gouvernement d'Ankara de restituer une partie des biens des minorités religieuses spoliées après 1936. Voici la traduction française de ce courrier.

 

Monsieur le Premier Ministre,

Par voie de presse, nous avons été informés de la décision de votre gouvernement de restituer les propriétés confisquées après 1936 aux minorités religieuses de Turquie. Cette décision constitue sans aucun doute une mesure visant se prémunir contre les récentes évolutions de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, ainsi que contre les enquêtes et les procédures du Congrès américain sur l’oppression par la Turquie de ses minorités non musulmanes.

En tant que représentant spirituel et légal du Catholicossat arménien de Cilicie, qui fut déraciné de son siège séculaire, et en tant que représentant des enfants de l’Eglise arménienne similairement déracinés, qui furent exilés de Turquie et dispersés à travers le monde, nous considérons la décision prise par votre gouvernement le 27 août 2011 comme incomplète et injuste.

Le Saint-Siège de Cilicie reste le propriétaire légal de nombreux églises, hôpitaux, maisons de soins, orphelinats, cimetière et autres propriétés qui appartiennent et la nation et à l’église et qui furent saisis par l’Etat turc durant ces jours du Génocide arménien de 1915. Le peuple arménien continue d’être le propriétaire légal des maisons, commerces et biens fonciers – hérités de leurs ancêtres – et fut victime du génocide qui fut planifié et exécuté par le gouvernement turc ottoman.

La décision de votre gouvernement peut satisfaire les requêtes de l’Union européenne. Cependant, elles ne peuvent en aucun cas être considérées comme des décisions basées sur les principes de Justice.

Monsieur le Premier Ministre, bien que prise au nom de la Justice, votre décision est partiale et sélective et de plus, elle nie sans aucun doute l’Histoire et rejette les principes et les valeurs démocratiques. Les institutions internationales – par exemple la Cour Européenne des Droits de l’Homme, le Parlement et les institutions parlementaires – protègent et mettent en œuvre les principes et les valeurs démocratiques. Leur conscience est le peuple.

En tant que représentant de la Ligue des Nations et Prix Nobel de la Paix, Fridtjof Nansen observa dans son livre bien connu de 1928, L’Arménie et le Proche-Orient, que le peuple arménien n’avait jamais perdu espoir, en travaillant bravement et en attendant. « Ils continuent à attendre » écrivait-il. Et nous souhaiterions ajouter que le peuple arménien ne cessera jamais de demander Justice à la Turquie pour le Génocide des Arméniens. Le peuple arménien ne cessera jamais de demander la restauration de ses droits humains.

Monsieur le Premier Ministre, votre déclaration selon laquelle votre gouvernement respecte la Justice et les Droits de l’Homme ne sera valide que lorsque vous reconnaîtrez le Génocide des Arméniens.

Catholicos Aram I

Saint Siège de Cilicie 

31 Août 2011

Antélias Liban

 

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