Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - 01 juillet 2015 

L'année 2015 marque le centenaire du génocide des Arméniens et des Assyriens de Turquie, qui fut suivi de celui à l'encontre des Grecs.

Toutes ces civilisations, présentes depuis des millénaires en Asie mineure, et qui ont ensuite perduré depuis le XIe siècle sous le joug du colonisateur turc, ont été éradiquées dans le sang et les larmes par le gouvernement Jeune-Turc à l'ombre de la première guerre mondiale.

À ce jour, la Turquie - impunie depuis 100 ans - persiste à nier ces génocides pluriels perpétrés contre ses minorités chrétiennes et tente d'imposer dans le monde entier sa lecture falsificatrice. Il n'est donc pas anodin de voir un grand festival international comme Europalia - qui présente à Bruxelles tous les deux ans l’essentiel du patrimoine culturel d’un pays - consacrer à la Turquie son 25e festival qui se déroulera du 6 octobre 2015 au 31 janvier 2016.

Le 28 mai dernier, la directrice générale d'Europalia, Kristine De Mulder, a cru bon de préciser que "Les communautés arménienne, grecque, assyrienne ou encore kurde seront également mises en lumière lors du festival", et a ajouté : "Nous reviendrons, par exemple, sur les rituels ancestraux arméniens lors de la grande exposition Anatolia."

On comprend, au vu des débats houleux qui agitent la Belgique depuis le mois d'avril sur la question de la reconnaissance du génocide arménien et du négationnisme intolérable des élus belgo-turcs, que la direction d'Europalia veuille donner le change en plaquant quelques manifestations culturelles politiquement correctes, faisant référence aux populations autochtones de Turquie, non-turques ou non-musulmanes.

Mais il nous est permis de douter qu'une manifestation - qui sera inaugurée le 6 octobre prochain par le président turc Recep Tayyip Erdogan - expliquera le pourquoi et le comment de la subite disparition en 1915 de "ces rituels ancestraux arméniens" et de l'extermination programmée de trois peuples distincts, sans compter le sort réservé depuis des décennies à la minorité kurde.

Nul n'ignore par contre que la Turquie profite de toutes les manifestations officielles où elle est présente pour distribuer au public des brochures négationnistes sur les "allégations arméniennes" ou d'autres, plus perverses, sur "la mémoire juste", mettant sur un même plan les victimes arméniennes du génocide ordonné par leur propre gouvernement ottoman, et les victimes civiles turques, tombées sous le feu des armées française, britannique et russe. En tout état de cause, la direction d'Europalia se doit de garantir qu'aucune prose négationniste ne sera disponible sous quelque forme que ce soit.

Signalons, puisque il est question de culture, que la Turquie négationniste poursuit non seulement une politique discriminatoire, raciste et menaçante envers les micro-communautés arménienne, assyrienne et grecque subsistant sur son sol, mais persiste à spolier leurs biens culturels et religieux. Quant à la "protection" du patrimoine architectural arménien, elle consiste - dans le meilleur des cas - à "exécuter" de rares restaurations d'un niveau lamentable (cf. le "viol" d'Ani ), et - le plus souvent - à transformer des églises arméniennes en mosquées, étables ou habitations.

C'est donc sans état d'âme que le site Europalia - qui présente la Turquie "comme un berceau de cultures" en omettant l'adjectif "éradiquées" - indique que "peu d’autres pays ont vu tant de civilisations se succéder ou coexister et il en a résulté des croisements culturels extraordinairement fertiles au cours des siècles. La Turquie, carrefour des cultures d’Asie et d’Europe, est donc la candidate idéale pour cette édition."

La Turquie, qui poursuit en 2015 son œuvre génocidaire contre les chrétiens d'Orient, les Yézidi et les Kurdes, en armant et en soutenant les barbares de l'État islamique, est effectivement la candidate idéale pour cette édition de la honte, qui se tient - et ce n'est pas un hasard - à l'occasion des 100 ans du génocide de 1915.

Collectif VAN

P.S. : Le site progressiste belge Info-Türk se demande pour sa part si les propos de Kristine De Mulder concernant "la mise en lumière" des communautés non-turques, ne tiennent pas plutôt de l'effet d'annonce afin de "duper l'opinion européenne", et s'interroge en ces termes : "Quelles institutions arméniennes, assyriennes, grecques et kurdes ont-elles été invitées à la programmation d'Europalia-Turquie?" (Lire ICI).

Nous pensons pouvoir répondre que les institutions arméniennes, assyriennes, grecques et kurdes de Belgique ne seront sans doute pas représentées mais qu'il y aura des prestations d'artistes originaires de Turquie, incluant soit des artistes de ces minorités, soit faisant référence à leur apport. La question est de savoir si les institutions turques de Belgique auront "pignon sur rue" lors de ce festival, et si oui, si la direction d'Europalia leur interdira de présenter leur propagande négationniste habituelle.

 À ce jour, une recherche sur les mentions suivantes donne :

Pour la mention "Grec" : 4 Événements

Karagöz

Reşat Öden & Gadjo Ensemble

Kemence Gecesi

The Ottoman Drums

 

Pour la mention "Arménien":  3 Évènements

Jordi Savall & Hespèrion XXI

Ensemble The Ottoman Drums

Arto Tunçboyacıyan & Ara Dinkjian

 

Pour la mention "Kurde" : 1 Évènement

Züleyha

 

Pour la mention "Assyrien": 0 Évènement