FRANCE 3 Provence -Alpes - 02/07
Emotion vendredi soir à l'Assemblée où les députés ont voté à l'unanimité un amendement gouvernemental inattendu au projet de loi "Égalité et citoyenneté", qui permettra de sanctionner la contestation des crimes contre l'humanité, dont le génocide arménien.

Ghislaine Milliet avec AFP

Les députés ont voté hier soir à l'unanimité un amendement inattendu au projet de loi "Egalité et citoyenneté", visant à pénaliser toute contestation de crimes contre l'humanité.
Ce texte "vaudra pour tous les crimes contre l'humanité, dont le génocide arménien" a assuré la secrétaire d'Etat à l'Egalité réelle Ericka Bareigts aux députés.
Les crimes concernés sont ceux de "génocide", les "autres crimes contre l'humanité", "les crimes de réduction en esclavage ou d'exploitation d'une personne réduite en esclavage" et "les crimes de guerre".

Emotion forte pour les députés marseillais
Marseille, qui compte la plus forte communauté arménienne de France, possède parmi ses députés des militants de la cause arménienne. D'où l'émotion affichée par de nombre d'entre eux, présents dans l'hémicycle ayant le sentiment de vivre un "moment historique".
"C'est un des plus beaux jours de ma carrière politique" a déclaré le député PS marseillais Henri Jibrayel, issu d'une famille rescapée du génocide. "Je suis heureuse de voir que le raisonnement que je mène, avec les juristes et parlementaires depuis des années, était le bon", s'est félicitée la LR Valérie Boyer, députée de Marseille, qui avait défendu la proposition censurée en 2012.
Cet amendement étend également cette sanction à la négation de ceux dont l'ancienneté exclut une reconnaissance par une juridiction mais sont reconnus historiquement, comme l'a fait le Parlement français avec une loi votée en 2001 reconnaisant le génocide arménien de 1915.
Pour la négation de ces derniers, une sanction interviendra dès lors que "leur contestation ou leur banalisation sera commise dans des conditions incitant à la haine ou à la violence". C'est cette dernière partie du texte qui fait penser au gouvernement que la loi pourrait échapper cette fois-ci à la censure du Conseil constitutionnel. Cet amendement, voté en première lecture, pénalise cette négation ou cette banalisation d'un an d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende.

"Ce texte n'est pas celui d'un peuple contre un autre, un peuple grandit en regardant son histoire" a lancé le PS Jean-Marc Germain à l'adresse de la Turquie. La Turquie réfute le terme de génocide, même si elle reconnaît des massacres.
Quelque 1,5 million d'Arméniens, hommes, femmes et enfants, ont été massacrés, selon les historiens, en Anatolie entre 1915 et 1917. En  2012, le texte de Valérie Boyer avait déclenché la colère des Turcs, leur Premier ministre (devenu depuis président) Recep Tayyip Erdogan y voyant "une montée de l'islamophobie et du racisme en Europe".

Contre l'esclavage
L'amendement du gouvernement a réécrit, avec son accord, un article du projet de loi initié en commission par le député guadeloupéen Victorien Lurel pour inclure l'esclavage dans la pénalisation de la contestation des crimes contre l'humanité.
Le texte, qui doit maintenant être débattu au Sénat, permettra aussi aux associations de lutte contre l'esclavage ou de défense de la mémoire des esclaves de se constituer partie civile dans ces procédures.